Le 5 septembre marque la date du jugement de Cheikh Ahmadou Bamba, fondateur de la voie soufie Mouridiyya et de l’Ecole Soufie Khidmatoul Khadim, Ecole de paix et de service.
Cheikh Ahmadou Bamba, en tant qu’imitateur du Prophète et serviteur de l’humanité conformément au modèle prophétique, avait un projet de société de paix qu’il définit dans son poème Matlaboush shifaa. Pour établir ce modèle de société en conscience, il lui fallait revoir l’organisation sociale en place. En tant que visionnaire, Cheikh Ahmadou Bamba savait toute l’importance d’une assise économique qui lui permettrait véritablement d’être indépendant afin d’assumer les quatre fonctions de l’existence.
En ce temps-là, le défi de Cheikh Ahmadou Bamba était l’établissement d’une société de paix par le biais de la non-violence. Aujourd’hui, quel est le rôle de la non-violence dans l’établissement de la paix dans le monde ?
Conscience et non-violence
Pour explorer le rôle de la conscience dans l’engagement pour la paix, il est nécessaire de nous interroger sur ce qu’est la conscience, puis d’examiner son rapport à la dignité humaine et son rôle dans l’édification d’une paix durable.
Einstein disait : « Aucun problème ne peut être résolu sans changer le niveau de conscience qui l’a engendré. » Et nous trouvons ce verset dans le Coran (13/11): « En vérité, Dieu ne change pas l’état d’un peuple, tant que les [individus qui le composent] ne changent pas ce qui est en eux-mêmes… »
Commençons dès le début de notre vie. En arrivant sur terre, nous recevons un certain nombre d’informations et de formations tant de la part de nos familles que de la société. Puis, au cours de notre enfance, nous faisons un certain nombre d’expériences relationnelles, agréables ou désagréables dont nous allons aussi tirer des conclusions définitives quant aux relations humaines. Ces divers apprentissages nous confèrent tout un ensemble de certitudes et de conventions que nous ne songeons pas à remettre en question et qui vont conditionner notre regard sur le monde.
Ce conditionnement est-il une forme de la conscience ? Écoutons encore Albert Einstein : « Ce qu’on appelle le bon sens est en fait l’ensemble des idées reçues qu’on nous a inculquées jusqu’à 18 ans. » Descartes, lui, disait de ce fameux bon sens qu’il « est la chose au monde la mieux partagée : car chacun pense en être bien pourvu. »
Le bon sens dont il parle ici, correspond peut-être à l’idée habituelle que le monde dans lequel on vit est normal, que les choses sont comme il faut qu’elles soient parce qu’elles ont toujours été ainsi, qu’elles correspondent aux idées et aux apprentissages reçus de génération en génération. Nous pensons ceci ou cela et, dans nos expériences, rien n’est venu nous remettre en question. Cela semble aller de soi.
Mais pouvons-nous prétendre être ainsi en conscience ?
Si nous prenons l’exemple de Gandhi, nous pouvons dire que sa vie est édifiante à tous les titres. Et particulièrement pour ce qui est de l’éveil de la conscience. Et pourtant, pendant toute sa jeunesse, sa vie étudiante et jusqu’au début de sa vie professionnelle, Gandhi était parfaitement conforme à ce qu’un jeune indien éduqué et colonisé se devait d’être. Il suivait le modèle dont ses parents rêvaient pour lui, et se conformait paisiblement aux attentes et aux modèles mêmes du colonisateur. Après le lycée, il part à Londres faire ses études et choisit la carrière d’avocat pour laquelle il n’a vraiment aucun talent particulier. Arrivé là-bas, il s’efforce de s’habiller comme un Anglais de la City et d’apprendre à danser les danses occidentales, bref, de vivre la vie d’un vrai Londonien.
Même s’il a vécu une petite résurgence culturelle lorsqu’il a renoué avec la tradition alimentaire hindoue du végétarisme, ce ne fut, là encore, que pour respecter le serment fait à sa mère avant de partir. Non, ce n’est pas en Angleterre que sa conscience s’est éveillée mais en Afrique du sud où, devant l’injure qu’il dût subir dans la gare de Maritzburg, son regard changea brusquement sur ce monde qu’il voyait soudain sous la lumière impitoyable de la réalité et non à travers le conditionnement qu’il suivait aveuglément jusqu’ici.
À partir de ce premier choc, Gandhi a vécu un véritable éveil de conscience qui l’a conduit à voir non pas sa seule situation mais, embrassant la société dans une perception plus vaste, et à se rendre compte aussi de la condition d’injustice et d’abus que vivaient les Indiens sous la colonisation britannique et afrikaner. À partir de ce moment, il remit en question le mode de vie et les valeurs selon lesquels lui-même et sa famille vivaient, dans l’Inde colonisée du 19ème/20ème siècle.
Notons ici que c’est par l’expérience que nous faisons du conditionnement que nous pouvons faire celle de la conscience. C’est à partir de la « vie conditionnée » que nous pouvons percevoir « la réalité en conscience » et « vivre l’expérience de la prise de conscience ». Il n’y a donc à condamner aucune de nos expériences, aucune part de nous-mêmes par rapport à l’autre, l’une étant censée être bonne et l’autre mauvaise. Toutes sont nécessaires à l’éveil de notre conscience. C’est de cette manière que nous commençons à sortir de la dualité. Cette conscience qui s’éveille ne va pas jaillir d’un coup, elle va progresser en spirale pourrait-on dire. Chaque situation proposée par le déroulement de la vie, va créer des occasions de l’affiner.
Revenons à Gandhi : c’est très progressivement qu’il a perfectionné son diagnostic sur les dysfonctionnements de sa société et qu’il va approcher la mise en place de solutions non violentes. C’est ce qui explique par exemple, qu’au début de son parcours, il ait pu demander aux Indiens de s’engager dans l’armée aux côtés des Britanniques pour les soutenir pendant la Première Guerre mondiale. Selon son raisonnement, si l’on désirait la citoyenneté, la liberté et la paix dans l’Empire, il était logique de participer à sa défense. Il pensait qu’après cette guerre et à partir de l’engagement commun, une évolution positive pourrait naître dans les relations entre les Britanniques et les Indiens. Il n’en fut rien, bien au contraire. C’est, entre autres, ce qui le conduira à reconsidérer très profondément sa philosophie et sa pratique de la non-violence.
C’est ainsi que les spires de conscience, à chaque fois plus élevées, hisse l’être de paix vers des sphères plus hautes avec des résultats supérieurs, qui seront utiles à tous.
Gandhi a pris conscience de l’atteinte faite par les Blancs d’Afrique du sud à la dignité extérieure des Indiens et au-delà, à celle des Noirs. Nous définissons la dignité extérieure d’un être humain comme sa capacité à remplir les quatrefonctions de l’existence, à savoir :
- Se nourrir
- Se loger
- Se vêtir
- Assurer sa santé et sa sécurité.
Or, les conditions dans lesquelles vivaient ces populations étaient rendues très difficiles par la colonisation qui multipliait les tracasseries, les injustices et les humiliations à leur endroit. Gandhi eut alors la claire conscience que cette situation n’affectait pas seulement l’aspect extérieur de la dignité des Indiens, mais qu’insidieusement cela pénétrait leur Être jusqu’à ce qu’ils en arrivent à considérer l’avilissement comme normal, comme inhérent à leur nature même.
Un autre acteur de la non-violence a exprimé ouvertement ce phénomène. En 1962, Martin Luther King écrit : « Toutes les formes de discrimination avaient été simultanément déployées sous nos yeux à Albany : ségrégation scolaire, déni du droit de vote, ségrégation dans les parcs, les bibliothèques, les restaurants et les autobus.«
« Les Noirs d’Albany souffraient en silence. On pouvait sentir en eux la douleur lancinante de la ségrégation, mais rien ne se voyait. Elle blessait les Noirs à chaque instant de leur existence. Ils vivaient dans la ségrégation, ils se nourrissaient dans la ségrégation, ils étudiaient dans la ségrégation ; ils priaient, roulaient en voiture, travaillaient, mouraient dans la ségrégation. Et en silence. Ayant perdu le respect de soi, ils étaient aussi atteints dans leur fibre morale. Leur insatisfaction se retournait contre eux-mêmes… » [1]
On le voit, la dignité extérieure liée aux quatre fonctions de l’existence, et par conséquent au domaine du corps, affecte également la notion de dignité intérieure qui, elle, relève :
- Du domaine de l’esprit, ce qui permet de préserver l’individu du conditionnement par les mythes et les demi-vérités en cours dans la société,
- Du domaine de l’âme qu’il faut préserver de toute frustration et de toute altération,
- Du domaine du cœur qu’il faut préserver de toute haine, de tout orgueil et de tout vice.
Dans un tel contexte, la question de la restauration de la dignité humaine est abordée, premièrement selon la logique duale de la société, c’est-à-dire dans le principe des contraires, soit entre ce qui est « bon » et ce qui est « mauvais » :
En premier lieu, selon un mouvement « naturel » de « bon sens », on va faire usage de la force : on revendiquera brutalement des droits, réclamés, voire arrachés à la partie opposée, dans tout le registre des exigences de la dignité extérieure.
On est là dans le cadre de l’Avoir (l’argent, le pouvoir, les postes enviables, la renommée par exemple) pour pouvoir Faire, cequi permettra enfin d’Être quelqu’un de reconnu, d’honoré.
La récupération de la dignité peut etre abordée selon l’attitude de l’Etre de paix : celui-ci, dans ce contexte de conflit, se fera au contraire un devoir d’harmoniser les opposés de la société et non de les confronter. C’est-à-dire que, sans abandonner ses droits, il demeurera conscient de ses devoirs envers l’ensemble de la société car il ne se laisse pas enfermer dans la pseudo logique de la dualité. Ces deux approches vont avoir des conséquences évidemment non identiques.
Le mouvement violent présente un grand danger. Il fait passer la société d’un extrême à l’extrême opposé : de l’asservissement à la révolte par exemple. Rappelons-nous l’épisode de Nelson Mandela à sa sortie de prison. Si Mandela lui-même n’avait pas fait une proposition pacificatrice, tous les Noirs d’Afrique du Sud auraient été prêts à enflammer le pays. Et ce, d’autant plus facilement qu’ils étaient largement plus nombreux que les Blancs. C’est ce qui est arrivé d’une autre manière en Algérie lors de la décolonisation qui vit les Algériens renvoyer quasiment sans bagages les ex-colons français en métropole sur fond d’embuscades et d’attentats. Cette situation qui voit basculer l’opprimé dans le rôle de l’oppresseur, fut d’ailleurs la plupart du temps le lot de la décolonisation.
Or, quand l’opprimé devient oppresseur, en réalité rien n’a changé. Car la seule chose qui ait changé, c’est l’auteur de l’oppression. On s’est donc simplement contenté de « remplacer » un oppresseur par un autre. Mais on est toujours, au fond, dans le schéma d’une société de violence dont une partie des membres a pris le pas sur l’autre.
Par ailleurs, lors du basculement de l’opprimé dans le rôle de l’oppresseur, on voit apparaître un second phénomène : dans leur volonté de voir restaurée leur dignité extérieure, les acteurs du mouvement revendicatif violent vont tomber dans l’avidité. Sans cela, on pourrait penser qu’en unifiant les moyens et les opportunités, tout le monde pourrait satisfaire sa dignité extérieure et se trouverait en mesure de Faire quelque chose pour Être quelqu’un.
À ce moment-là, tout le monde serait satisfait et personne ne songerait à troubler la paix ainsi obtenue. Protéger et satisfaire la dignité extérieure semble donc bien être la fonction de la paix extérieure. Mais il n’y a pas de population homogène : les cultures, les histoires sont multiples. La compétition, la jalousie, la haine… se mettent rapidement en place. Les objectifs changent et l’instinct de domination conserve ses droits. Pour conjurer cette violence, il faut qu’interviennent les régulateurs naturels de l’avidité, qui sont la conscience et le sens des responsabilités. Sans conscience, il ne peut être question de remise en cause et la société nouvelle demeure bloquée sur ses bases oppressives. Le cercle vicieux est bouclé et on revient à la case départ.
À l’opposé de ce mouvement de revendication des droits, les mouvements non violents que mènent les Êtres de paix, ne vont pas se fonder sur le modèle de l’Avoir. Leur conscience se positionne sur la valeur intrinsèque de l’humain quel qu’il soit, sachant que dans la pensée non violente, nul homme n’est supérieur à un autre, ni de par sa nature, ni de par son origine, ni de par sa croyance. Par conséquent, les besoins de tous et de chacun sont légitimes et il devient un devoir de les satisfaire. Le mouvement non violent se fonde sur l’Être. Comprenant que l’autre ne nous est pas étranger, une vérité universelle, une règle d’or apparait, qui va s’appliquer à toutes les composantes de la société et dont toutes les sagesses [2] rendent compte :
Judaïsme : Ce que tu tiens pour haïssable, ne le fais pas à ton prochain. C’est là toute la loi ; le reste n’est que commentaires. (Talmud, Sabbat : 31 a)
Christianisme : Ainsi, tout ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faites-le vous-mêmes pour eux : voilà la loi et les prophètes. (Mathieu : 7, 12)
Islam : Nul de vous n’est croyant s’il ne désire pour son frère ce qu’il désire pour lui-même (Tradition prophétique (Hadith))
Bouddhisme : Ne blesse pas autrui de la manière qu’il te blesserait. (Udana-Varga : 5, 18)
Brahmanisme : Telle est la somme du devoir : ne fais pas aux autres ce qui, à toi, te ferait du mal. (Mahabharata : 5, 1517)
Confucianisme : Voici certainement la maxime d’amour : ne pas faire aux autres ce que l’on ne veut pas qu’ils nous fassent. (Analectes `15, 23)
Taoïsme : Considère que ton voisin gagne ton pain, et que ton voisin perd ce que tu perds. (T’ai Shang Kan Ying Pien)
Zoroastrisme : La nature seule est bonne qui se réprime pour ne point faire à autrui ce qui ne serait pas bon pour elle. (Dadistan-i-dinik : 94, 5)
Amérindien : Tu ne peux juger un Indien sans avoir marché un mois dans ses mocassins (Proverbe amérindien)
Une première conséquence de l’application de cette loi de la paix sera la suivante : on ne va plus exiger la reconnaissance de nos droits mais on va s’assurer que chaque acteur de la société, dont bien entendu nous-mêmes, respecte ses devoirs à l’égard de tous et de chacun. Habité par cette conscience de sa responsabilité, l’individu est alors dans la voie de la satisfaction des besoins, les siens comme ceux des autres. Il quitte la voie de l’Avoir et se trouve ainsi dégagé des fièvres de l’avidité. Et il sait de plus que, comme le disait Gandhi : « Il y a assez de tout sur terre pour satisfaire aux besoins de tous, mais pas assez pour assouvir l’avidité d’un seul. » Appuyé sur la conscience liée à l’Être, il pourra faire des actes responsables qui déboucheront sur un avoir bénéfique à tous les éléments de la société comme de la nature.
Cette société véritablement non violente, permet la réalisation la plus profonde de la dignité intérieure qui ne peut être ravie à quiconque la détient, même si on lui retire tout ce qui fait la dignité extérieure, même si on le frappe, si on le ruine, si on le conduit en prison.
« Ne croyez jamais que vous n’avez personne sur qui compter. Allez en prison si c’est nécessaire, mais vous n’y allez jamais seul. Prenez position pour ce qui est juste, même si le monde peut se méprendre sur vous et vous critiquer. Mais vous n’êtes jamais seul car j’ai lu quelque part qu’un homme, s’il est avec Dieu, forme une majorité. » Martin Luther King Jr (lettre de la prison de Birmingham ??) [a1]
Mais les besoins de tous ne sauraient être satisfaits sans la prise en compte des différences que comptent les membres de la société humaine. Dans une société de violence, les différences sont des occasions de conflits. Dans une société de paix, ce sont elles qui vont former le terreau de la paix. De quelle manière ? L’Être de paix considère que les différences qui distinguent les hommes entre eux, mettent au jour une grande science. Cette science sert les intérêts de tous si l’on comprend que les différences sont à vivre non comme des confrontations mais comme des compétences complémentaires.
D’une part, il y a un intérêt pratique, quasi matériel, à la reconnaissance et à l’utilisation des compétences diverses que révèlent ces différences : en effet, ce que je n’ai pas, tu l’as, et inversement. C’est ainsi qu’il apparaît clairement que la différence est une nécessité de vie.
D’autre part, le non-violent est conscient qu’aucune paix ne saurait être durable aussi longtemps que tous les membres de la société ne seront pas équitablement servis et respectés dans les différentes composantes de leur dignité extérieure et intérieure. C’est pourquoi la loi qu’il convient d’appliquer, est la vérité universelle que nous avons développée tout à l’heure : vouloir pour l’autre ce qu’on veut pour soi-même.
Cependant si les Êtres de paix ont réussi à mettre en place les conditions favorables à la paix, nous voyons, à l’épreuve de l’histoire, que celle-ci survit peu à leur disparition. En effet pour que la paix soit durable, il faut que l’Être de paix ait le temps d’éveiller les autres à la conscience. Compte tenu de cette loi du « vouloir pour l’autre ce qu’on veut pour soi-même », l’Être de paix se fait un devoir de conduire les individus sur une voie d’élévation morale à la hauteur de leur dignité intérieure imprenable.
Martin Luther King développait cette notion de responsabilité personnelle implicite en ces termes : « Accepter passivement un système injuste, c’est en fait collaborer avec ce système. L’opprimé devient par là aussi pécheur que l’oppresseur. Ne pas collaborer au mal est une obligation morale, au même titre que collaborer au bien. L’opprimé ne doit jamais laisser en repos la conscience de l’oppresseur.[3]
Pour cela, l’action non violente sera le moteur de l’éveil. Martin Luther King écrit : « Je dois avouer que je ne crains pas le mot « tension ». Par mon travail et mes prédications, je me suis montré sincèrement hostile aux tensions violentes, mais il est une sorte de tension constructive et non- violente, indispensable si l’on veut faire évoluer une situation. Selon Socrate, il convient de créer une tension dans l’esprit des individus afin qu’ils se libèrent des chaines imposées par les mythes et les demi-vérités, et s’élèvent jusqu’au libre domaine ou règnent l’analyse créatrice et l’appréciation objective ; de même, il nous faut considérer le besoin d’un stimulant non violent qui crée dans la société la tension nécessaire pour que les hommes s’élèvent au-dessus des profondes ténèbres du préjugé et du racisme, vers les majestueuses altitudes de la compréhension et de la fraternité… »
L’action de Martin Luther King a créé une tension dans la société, comme celle de Jésus, des prophètes et des saints. Ils ont secoué leurs contemporains pour leur permettre d’accéder à la conscience de la dignité intérieure. L’Être de paix, sachant que l’autre a les mêmes aspirations que lui au bonheur et à la paix, s’efforcera de l’amener aux plus hauts niveaux de conscience donnant accès au plein exercice de leur responsabilité dans tous les domaines de la vie.
Là encore, Martin Luther King écrit : « La religion rappelle à tout homme qu’il est ‘le gardien de son frère’. Accepter passivement l’injustice – la ségrégation – revient à dire à l’oppresseur que ses actes sont moralement bons. C’est une façon d’endormir sa conscience. Dès cet instant, l’opprimé cesse d’être le gardien de son frère. L’acceptation, si elle est souvent la solution de facilité, n’est pas une solution morale : c’est la solution des lâches. »
Bien des années plus tard, le 21 février 1990, Vaclav Havel, écrivain et président de la république tchèque, déclarera : « Sans une révolution globale dans le domaine de la conscience humaine, rien ne va s’améliorer […] et la catastrophe vers laquelle se dirige ce monde – l’effondrement écologique, social, démographique ou général de la civilisation – sera inévitable. »
Cette conscience de la responsabilité de l’Être humain dans le monde, va donner à celui-ci la mesure de son véritable pouvoir qui y est inhérent et dont il dispose pour transformer sa société. Tout alors devient possible, y compris l’irruption d’un Âge d’Or devenu réalité ou, comme le disent les croyants, l’édification sur terre du Royaume de Dieu.
[1] (Autobiographie – MLK. Textes réunis par Clayborne Carson. Ed. Bayard 2008, page 190)
[2] Source : Extrait de Dubos, René, Choisir d’être humain, éd. Denoël cité par Languirand (1990)
[3] (Extraits de « Combats pour la liberté », 1958)